Le CSA fixe des contraintes légales à respecter…

Katsikeas, Samiee et Theodosiou (2006) indiquent qu’il convient de prendre en compte les contraintes légales du marché sur lequel une entreprise souhaite opérer, pour connaître le degré de standardisation ou d’adaptation qu’il convient de réaliser.

Tous les répondants s’accordent à dire que le CSA est un élément principal dans le paysage audiovisuel français. Cette entité fixe de nombreuses règles, limitant la marge de manœuvre des chaînes et sociétés de production en matière de choix et de réalisation.

Contrairement à d’autres pays, les chaînes françaises ne peuvent pas diffuser ce qu’elles souhaitent : en fonction des horaires et de la chaîne, la diffusion de certains programmes aux contenus jugés inappropriés va être restreinte. Cela force les chaînes à diffuser des programmes dont le contenu est adapté au moment de diffusion, ce qui présente aussi une motivation à la modification du format original.

D’autres règles vont vouloir qu’un certain pourcentage des émissions diffusées soit des programmes français, produits en France, ou encore que chaque chaîne fasse appel à un certain nombre de producteurs différents. Pour avoir un certain programme fort, il faudra à la chaîne faire des concessions sur d’autres programmes. Le choix des émissions et leur réalisation ne se font donc pas librement.

Les règles fixées par le CSA sculptent ainsi le paysage audiovisuel français, et le forcent à se différencier de ce qui peut se faire à l’international : « En France on a quand même énormément de barrières à cause, ou grâce, au CSA, on le voit comme on veut : et ces barrières font que nous n’avons pas la même culture audiovisuelle ».

… auxquelles viennent s’ajouter des contraintes contractuelles…

Aux contraintes fixées par le CSA, viennent s’ajouter des contraintes propres aux contrats conclus lors de l’achat d’un format.

Lorsqu’un format est créé, il va être déposé et les droits d’adaptation vont ensuite être vendus par les ayant-droits sur le marché international. Lors de la vente, tous les droits ne sont pas nécessairement donnés à l’acheteur, certaines contraintes de mise en scène, ou de réalisation, doivent être respectées : « un format c’est charté, et on n’a pas le droit de toucher au décor ou à quoi que ce soit ».

Les négociations vont donc consister à acheter un format « clé en main » pour lequel la réalisation devra être respectée, ou simplement un concept qui laissera une plus grande marge de manœuvre en matière d’adaptation.

Parfois, ces contrats forcent l’acheteur à acheter plusieurs programmes au vendeur, pour s’assurer d’obtenir le programme fort qu’il vise.

Ces contraintes contractuelles vont tendre à s’assouplir avec le temps, permettant plus de latitude dans la réalisation du format, et plus d’adaptation.

… et le coût des émissions, un frein majeur à la prise de risques

Selon Levitt (1983), un des majeurs avantages de la standardisation est qu’elle permet de réaliser des économies d’échelle. Cette idée est aussi soutenue par Lage, Lage et Abrantes (2007), qui indiquent que la standardisation permet de réduire les coûts.

Il s’est avéré au cours des entretiens que cette question de coûts occupe une place très importante lors des décisions de création et de diffusion d’un format. Les programmes en France coûtent très cher, et la tolérance de l’échec semble proche de zéro : « les Etats-Unis, Big Brother, c’est un prime par semaine. Donc si ça se plante, ma foi, c’est une heure, ce n’est pas très grave, même si c’est cher. Nous, si ça se plante, c’est une catastrophe ».

Cependant, bien qu’une standardisation pure permettrait de réduire drastiquement les coûts, les grandes chaînes s’y refusent car elles tiennent à leur image de qualité.

En raison de ces coûts, contrairement à d’autre pays, la France va très peu diffuser de nouveautés internationales, et ne va pas créer ses propres formats : « Il y a très peu de création en France, on est assez frileux pour lancer des nouveautés, des choses qui n’ont jamais existé ». Les chaînes ont peut d’un échec d’un format dont le succès n’aurait pas été prouvé ailleurs, ce qui entrainerait une déprogrammation et une parte financière importante.

Les chaînes vont donc préférer une stratégie de standardisation adaptée, mais ce n’est pas le coût de création du programme en lui-même qui va sembler motiver ce choix, plutôt la marge de risque. Il semblerait en effet que le coût de réalisation d’une création, et donc d’une stratégie d’adaptation, ne soit pas très différent du coût d’une stratégie de standardisation adaptée. Les diffuseurs vont simplement préférer un programme dont le succès a été prouvé dans d’autres pays, à un programme complètement novateur : le risque financier est moins important.

Pour ces produits particuliers, la stratégie de standardisation adaptée ne semble donc pas proposer d’économies d’échelle considérables par rapport à une stratégie d’adaptation. Seule la stratégie de standardisation semble confirmer ces économies, mais demeure une stratégie peu employée : « Sur les plus petites chaines, souvent on n’adapte pas, car ils n’ont pas le budget, et ce sont des micro-audiences, c’est souvent pas très gros du coup ils travaillent moins leur adaptation », « la traduction pure et dure, ça ne se fait plus trop. C’est quelque chose qu’on fait quand on est une chaine qui n’a pas beaucoup d’argent ».

 

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